Tendinopathie rotulienne (tendinite): quand le tendon du genou dit stop
- Denis Fortier

- 7 oct.
- 7 min de lecture
Dernière mise à jour : 15 oct.

La douleur au genou, juste à la base de la rotule, n’apparaît jamais par hasard. Elle peut se manifester après un saut, un faux mouvement, un entraînement soutenu ou même une montée d’escaliers un peu trop exigeante. Chez les sportifs, on la surnomme parfois le genou du sauteur.
Derrière cette douleur se cache souvent une tendinopathie rotulienne — une affection du tendon rotulien, ce lien solide entre la rotule et le tibia qui transmet la puissance du quadriceps, l’un des muscles les plus forts du corps humain. Ce tendon, comparable à un câble souple mais résistant, assure la stabilité et la puissance du mouvement.
Mais quand la charge dépasse sa capacité d’adaptation, il s’irrite, se fragilise… et finit par se faire entendre.
Dans mon article d’aujourd’hui, je vous explique pourquoi cette douleur s’installe, comment la comprendre… et surtout, comment la soulager efficacement.
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Quand le tendon dit « trop, c’est trop »
Un tendon est une structure fibreuse qui relie un muscle à un os. Sa mission : transmettre la force musculaire pour permettre le mouvement. Il encaisse chaque jour des milliers de contraintes — de 0,6 fois le poids du corps lors de la marche à plus de 8 fois le poids du corps lors d’un squat décliné sur une seule jambe !
La tendinopathie rotulienne survient lorsque ces contraintes se répètent sans laisser au tendon le temps de s’adapter, notamment lors de variations trop brusques de la charge ou du type d’effort. Trop de sauts, de changements de direction ou une reprise d’activité trop rapide — qu’elle soit sportive, professionnelle ou de loisir — peuvent provoquer une irritation locale.
Peu à peu, la structure du tendon se modifie : les fibres se désorganisent, la circulation sanguine se dérègle, et la douleur s’installe.
Qui est à risque ?
Certaines situations favorisent l’apparition d’une tendinopathie rotulienne, surtout lorsque la capacité du tendon à s’adapter est dépassée. Les principaux facteurs de risque incluent :
Une mauvaise gestion de la charge d’effort, par exemple une progression trop rapide de l’entraînement, une intensité accrue sans préparation ou un manque de récupération entre les séances ;
Une raideur excessive des quadriceps ou des mollets, qui augmente la tension exercée sur le tendon rotulien ;
Un alignement imparfait du membre inférieur — genou qui s’affaisse vers l’intérieur, pied pronateur, ou rotation excessive de la hanche — modifie la ligne de traction et augmente le stress sur le tendon.
En clinique, la douleur est le plus souvent localisée sous la rotule, accentuée à la palpation ou lors d’une mise en tension du tendon — par exemple lors d’un demi-squat ou d’une descente lente sur une jambe. Une raideur matinale peut parfois être observée, signe potentiel d’un tendon sensible ou irrité.
Et parce que la gêne se situe à l’avant du genou, cette affection est parfois confondue avec le syndrome fémoro-rotulien, qui touche davantage l’articulation entre la rotule et le fémur.
La tendinopathie rotulienne survient lorsque ces contraintes se répètent sans laisser au tendon le temps de s’adapter, notamment lors de variations trop brusques de la charge ou du type d’effort.
Le tendon a horreur du vide… et du repos absolu
Plutôt que de miser sur le repos absolu, les études récentes soulignent une idée centrale : le tendon a besoin de mouvement pour retrouver sa pleine efficacité, mais d’un mouvement mesuré et progressif.
La revue Cochrane montre que les exercices thérapeutiques structurés donnent de meilleurs résultats que les approches passives. Parmi eux, les programmes à charge lente et progressive occupent une place majeure. Ces exercices combinent deux types de travail musculaire :
excentrique, lorsque le muscle se contracte tout en s’allongeant — par exemple lors d’une descente lente en squat — ce qui stimule la régénération et la solidité des fibres tendineuses ;
concentrique, lorsque le muscle se raccourcit au moment de la remontée, renforçant la puissance et la coordination du mouvement.
Cette approche, appelée Heavy Slow Resistance (résistance lente et progressive), permet de renforcer le tendon sans l’irriter, en favorisant sa réorganisation interne et sa capacité à supporter la charge.
Une autre étude a comparé cette approche active à des traitements plus passifs, comme les traitements d’ultrason à hautes doses. Les conclusions convergent : le travail musculaire progressif et la gestion adaptée de la charge surpassent largement les interventions techniques isolées, à condition d’être bien encadrés. Les chercheurs soulignent que la rééducation est avant tout un apprentissage corporel : le patient devient acteur de son adaptation, et non simple récipiendaire d’un traitement.
Enfin, des chercheurs de l’Université du Delaware rappellent que la force seule ne garantit pas la guérison. Ce qui importe, c’est la progression, la constance et la qualité du mouvement : réintroduire la charge, oui, mais avec discernement — sans réveiller la douleur.
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Le temps et la patience du tendon
Un tendon ne guérit pas à la vitesse d’un muscle. Son tissu fibreux s’adapte lentement : il faut des mois, parfois plus d’un an, pour que sa structure retrouve sa solidité et sa tolérance à la charge.
Les études de suivi à long terme montrent toutefois des résultats encourageants. La grande majorité des athlètes traités par physiothérapie rapportent une amélioration durable de leur fonction et de leur qualité de vie.
Au-delà des sensations et des progrès cliniques, certaines recherches se sont penchées sur ce qui se passe à l’intérieur du tendon après la guérison. Des études prolongées révèlent que, même après plusieurs années, des anomalies visibles peuvent persister à l’imagerie sans qu’aucune douleur ne soit présente. Cela montre que l’aspect du tendon à l’imagerie ne reflète pas toujours sa santé réelle : un tendon peut paraître altéré tout en étant parfaitement fonctionnel. On peut retrouver une vie active et indolore, même si le tissu ne paraît pas « parfait » sous le microscope.
Un tendon ne guérit pas à la vitesse d’un muscle. Son tissu fibreux s’adapte lentement : il faut des mois, parfois plus d’un an, pour que sa structure retrouve sa solidité et sa tolérance à la charge.
Du bon usage du mouvement
Chaque situation étant unique, il est essentiel d’adapter ces conseils à sa propre condition — idéalement après un examen clinique ou une consultation en physiothérapie.
1. Évaluer avant d’agir
Faire examiner le genou pour identifier la cause exacte de la douleur, écarter d’autres diagnostics possibles et cibler les exercices les plus pertinents.
2. Renforcer sans irriter
Commencer par des exercices isométriques — maintenir une contraction sans mouvement, comme un demi-squat tenu contre un mur. Introduire ensuite progressivement le travail excentrique et la résistance lente : mini-squats, fentes lentes, presses à jambes ou extensions de genou contrôlées.
3. Gérer la charge
Adapter l’activité sans la supprimer : réduire temporairement les mouvements qui déclenchent la douleur — sauts, course en descente, changements brusques de direction — tout en maintenant un niveau d’activité selon sa tolérance.La marche, le vélo ou la natation peuvent être d’excellents compléments, à condition d’être adaptés à la tolérance de chacun et à la phase de rééducation.
4. Être accompagné
Un suivi professionnel aide à ajuster la progression, corriger la technique et prévenir les rechutes. Les approches complémentaires — taping, ondes de choc, ultrasons — peuvent soutenir la rééducation, mais ne remplacent jamais l’exercice actif.
Trouver le juste rythme
La tendinopathie rotulienne traduit un déséquilibre entre la charge imposée et la capacité du tendon à y résister. Le traitement vise à restaurer cet équilibre par un mouvement régulier, dosé et progressif. Les recherches récentes le confirment : un exercice bien encadré, une progression graduelle et une pratique régulière demeurent les stratégies les plus efficaces pour retrouver un genou stable et fonctionnel.
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Références
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