Et si on repensait notre façon de marcher? Inclinaison, intervalles ou vitesse
- Denis Fortier

- 31 oct.
- 6 min de lecture

Marcher. Un geste si banal qu’on en oublie la puissance. Et pourtant, derrière cette simplicité se cache un formidable potentiel pour soutenir notre santé physique, métabolique et cognitive.
Dans mon article d’aujourd’hui, je vous propose de repenser la marche, non pas comme un simple moyen de déplacement ou un moment de détente, mais comme un outil concret de prévention et de mieux-être. Car au-delà du nombre de pas, c’est la manière de marcher qui détermine la portée réelle de ses effets sur le corps.
Trois dimensions méritent d’être explorées : l’inclinaison, les intervalles et la vitesse.
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S’incliner pour se renforcer
On associe souvent les pentes à la course en côte, aux sentiers de montagne ou à l’entraînement des randonneurs aguerris. Pourtant, rehausser légèrement l’inclinaison d’un tapis roulant ou choisir un parcours en montée douce transforme la marche en un effort plus exigeant… et plus bénéfique sur le plan physiologique.
Marcher en montée fait naturellement grimper la fréquence cardiaque et sollicite davantage les grands groupes musculaires — fessiers, quadriceps et mollets — qui jouent aussi un rôle essentiel dans la santé métabolique. Cette forme d’effort augmente la dépense énergétique tout en réduisant l’impact articulaire comparativement à la course. Elle constitue donc une option particulièrement adaptée aux personnes vivant avec de l’arthrose, un excès de poids ou de l’hypertension : trois situations où un effort soutenu, mais à faible impact demeure plus accessible.
Moins de chocs, mais pas sans impact
Ces trois conditions ont un point commun : la nécessité de limiter les chocs mécaniques, sans pour autant renoncer aux bienfaits cardiovasculaires ou métaboliques d’une activité plus intense. Cela ne signifie pas que la course soit à proscrire : lorsqu’elle est bien dosée, elle contribue aussi à renforcer les tissus, à stimuler la densité osseuse et à améliorer l’économie du mouvement. Tout est une question d’adaptation et de progressivité.
La marche inclinée peut, dans certaines conditions, rivaliser avec la course sur le plan cardiovasculaire. En modulant la pente et la cadence, on atteint des zones d’effort modéré à élevé, favorables à l’amélioration du VO₂ max, à la régulation de la pression artérielle et à une meilleure gestion du glucose sanguin.
Conseil pratique : commencez avec une pente de 5 à 7 % sur tapis roulant (ou équivalent en plein air) et limitez les premières séances à 10 à 15 minutes. Cherchez une respiration plus rapide, mais toujours maîtrisée. Mieux vaut intégrer plusieurs montées courtes dans vos marches hebdomadaires qu’une seule longue ascension occasionnelle.
Rehausser légèrement l’inclinaison d’un tapis roulant ou choisir un parcours en montée douce transforme la marche en un effort plus exigeant… et plus bénéfique sur le plan physiologique.
Marcher par intervalles : alterner pour mieux progresser
Fractionner l’effort n’est pas réservé aux coureurs. La marche par intervalles — qui gagnerait à être mieux connue et plus fréquemment pratiquée — consiste à alterner des phases de marche rapide et de récupération active. Et les résultats, documentés dans plusieurs études cliniques, sont remarquables.
Des chercheurs danois et japonais ont montré que ce protocole, appelé Interval Walking Training, améliore la capacité cardiovasculaire, la force musculaire et plusieurs marqueurs métaboliques, notamment chez les adultes de plus de 55 ans ou les personnes vivant avec un diabète de type 2.
Ce type d’entraînement est parfois désigné dans les médias sous le nom de « marche japonaise », mais cette appellation ne repose sur aucune définition officielle ni pratique culturelle précise. Elle découle simplement de la nationalité des premiers chercheurs qui ont documenté ce protocole — notamment Hiroshi Nose, Shizue Masuki et Tomonori Tanaka, affiliés à la Shinshu University. Pour rester fidèle aux publications scientifiques, mieux vaut parler simplement de marche par intervalles.
Plus étonnant encore, ces bénéfices sont obtenus sans qu’il soit nécessaire de courir. L’alternance de trois minutes de marche rapide — assez soutenue pour être essoufflé sans être à bout de souffle — et de trois minutes de marche plus lente pour récupérer suffit à induire une réponse physiologique favorable. En clair, ce n’est pas la vitesse absolue qui compte, mais le contraste entre les deux phases.
Un exemple de protocole :
3 minutes de marche rapide (essoufflement modéré, difficulté à parler en phrases complètes);
3 minutes de marche lente (respiration fluide, récupération active);
Répétez 5 cycles pour une séance d’environ 30 minutes.
Conseil pratique : pour atteindre un essoufflement modéré, certaines personnes devront augmenter la difficulté — par exemple en ajoutant un sac à dos légèrement chargé, en accélérant la cadence ou en combinant avec une pente.
Fractionner l’effort n’est pas réservé aux coureurs. La marche par intervalles — qui gagnerait à être mieux connue et plus fréquemment pratiquée — consiste à alterner des phases de marche rapide et de récupération active.
Vitesse de marche : le paramètre sous-estimé
On recommande souvent de « marcher davantage », de viser les 10 000 pas par jour, mais on parle trop rarement de marcher plus vite. Pourtant, la vitesse de marche est un excellent indicateur de santé : elle reflète la force musculaire, la capacité cardiovasculaire et même la longévité. Plusieurs études l’utilisent aujourd’hui comme un prédicteur de survie chez les adultes plus âgés.
Dans une étude récente, des chercheurs ont comparé la dépense énergétique entre la marche rapide et la course à vitesse équivalente. Résultat : au-delà d’environ 6,5 à 7 km/h, la marche devient paradoxalement plus coûteuse en énergie que la course lente, car la mécanique du pas perd en efficacité à très haute cadence. Autrement dit, le corps atteint naturellement une zone où il est plus économique… de courir.
Objectif : viser 100 pas par minute, soit environ trois pas toutes les deux secondes. Cela correspond à une marche rapide pour la majorité des adultes. Une chanson pop comme « Santé » de Stromae (≈ 100 battements par minute) peut servir de repère rythmique.
De nombreuses applications permettent aujourd’hui de suivre la cadence ou la vitesse moyenne, notamment Google Fit, Strava ou Pacer.
La marche devient paradoxalement plus coûteuse en énergie que la course lente, car la mécanique du pas perd en efficacité à très haute cadence.
Réconcilier accessibilité et efficacité
Ce qui rend la marche si précieuse, c’est sa simplicité : pas d’équipement spécialisé, pas d’horaires à respecter, pas de condition physique exceptionnelle requise. Mais lorsqu’on y ajoute une pente, une alternance d’intensité ou une cadence soutenue, elle devient aussi un levier thérapeutique.
En résumé
Inclinaison : sollicite davantage les muscles et le système cardiovasculaire, tout en ménageant les articulations dans certains contextes de santé.
Intervalles : améliore la capacité aérobie, la glycémie et la tension artérielle, même sans courir.
Vitesse : augmente la dépense énergétique et renforce la condition physique, à cadence soutenue.
Il ne s’agit pas nécessairement de marcher plus, mais de marcher autrement. Incliner, alterner, accélérer : trois gestes simples pour redonner à la marche toute sa puissance.
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Denis
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Références
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