Poitrine lourde et mal de dos : que dit la science ?
- Denis Fortier

- 9 sept.
- 6 min de lecture
Dernière mise à jour : 15 oct.

Certaines femmes souhaitent augmenter le volume de leur poitrine, d’autres cherchent à le réduire. Ces choix sont personnels et méritent d’être abordés avec délicatesse, car ils touchent à la fois à l’image corporelle, au confort et à la santé.
Précisons-le d’emblée : le but de cet article n’est pas de rendre problématique le fait d’avoir une poitrine volumineuse, mais bien d’apporter des informations et des pistes de solutions à celles qui éprouvent des douleurs ou des limites fonctionnelles liées à cette réalité.
La science s’y intéresse plus que jamais, et les données s’accumulent.
De nombreuses études démontrent que le poids des seins modifie la posture et contribue à des douleurs chroniques du dos, de la nuque et des épaules. J’en fais régulièrement le constat dans ma pratique, chez des patientes qui consultent spécifiquement pour ces symptômes.
Fait étonnant : les recherches les plus récentes révèlent aussi des effets sur la stabilité de la colonne, sur certains symptômes neurologiques et sur la qualité de vie globale.
Voyons ensemble ce que la science révèle…
Des changements posturaux… mais pas toujours visibles
Une équipe allemande a analysé la posture de 100 femmes (bonnets A à D) et a confirmé qu’une poitrine plus lourde déplace le centre de gravité vers l’avant, augmentant la force de bascule thoracique et la nécessité de compenser les contraintes exercées sur la région thoracique par un surcroît d’effort au niveau du cou et du bas du dos.
D’autres études, menées sur des cohortes plus importantes, n’ont pas retrouvé de différence significative dans l’angle de cyphose (la courbure naturelle du haut du dos) selon la taille des seins. En d’autres mots, le poids impose une contrainte mécanique aux muscles de la colonne, mais cela ne se traduit pas nécessairement par une courbure plus accentuée.
Douleurs fréquentes et impact sur la qualité de vie
Ces ajustements posturaux ne sont pas de simples observations biomécaniques : ils s’accompagnent souvent de douleurs bien réelles. Une étude israélienne menée auprès de 200 jeunes femmes âgées de 18 à 36 ans a mis en évidence un contraste marqué : seuls 4,9 % des participantes avec un bonnet B rapportaient des douleurs dorsales, contre 85 % chez celles portant un bonnet DD/E.
Ces douleurs, le plus souvent localisées au niveau cervical et thoracique, limitent la capacité de travail, compliquent les loisirs et nuisent à la vie sociale. Elles peuvent aussi s’associer à d’autres manifestations : engourdissements ou picotements dans les membres supérieurs, ou encore douleurs provoquées par le sillon profond des bretelles de soutien-gorge.
Une poitrine plus lourde déplace le centre de gravité vers l’avant, augmentant la force de bascule thoracique et la nécessité de compenser les contraintes exercées sur la région thoracique par un surcroît d’effort au niveau du cou et du bas du dos.
ENFIN EN LIBRAIRIE !
Je suis heureux d’annoncer l'arrivée en librairie de mon nouveau roman Corps étranger, publié aux Éditions Stanké, au Canada comme en France. Merci pour tous vos bons commentaires de lecture! 👉 Plus d'infos à découvrir ici.
Un rôle du poids corporel… mais aussi des muscles
On pourrait croire que tout est dit. Au contraire. L’excès pondéral accentue les contraintes mécaniques sur la colonne, renforçant l’effet d’une poitrine volumineuse.
L’indice de masse corporelle (IMC) reste toutefois un indicateur imparfait : il ne distingue pas la masse grasse de la masse musculaire et doit toujours être interprété avec d’autres mesures — par exemple, le tour de taille — pour mieux refléter le risque réel.
Autre fait marquant : l’endurance des muscles extenseurs du dos. Les femmes avec une poitrine plus volumineuse présentaient en moyenne une endurance réduite, jusqu’à 40 secondes de moins lors d’un test isométrique. Or, ces muscles posturaux sont essentiels pour stabiliser la colonne et limiter les microtraumatismes répétés.
Des risques moins connus: fractures et céphalées
Chez les femmes ménopausées, une poitrine volumineuse a été associée à une fréquence plus élevée de fractures vertébrales, indépendamment de la densité osseuse. Le lien statistique demeure modeste, mais il suggère que la surcharge mécanique exercée sur la colonne pourrait fragiliser les vertèbres au fil du temps.
Plus récemment, des neurologues ont mis en évidence un autre effet possible : les céphalées. Jusqu’à 89 % des femmes opérées pour macromastie, terme médical désignant une poitrine anormalement volumineuse, rapportaient des maux de tête avant l’intervention, et une proportion importante d’entre elles décrivaient une amélioration après une réduction mammaire. La compression mécanique au niveau du cou, des trapèzes et des épaules, mais aussi certains facteurs psychosociaux ou hormonaux, pourraient contribuer à l’apparition de ces douleurs.
Au-delà de ces atteintes physiques, la poitrine lourde peut aussi influencer aussi la dimension sociale et psychologique, l’estime de soi et la participation aux activités physiques. Certains sports deviennent difficiles à pratiquer, l’habillement se fait inconfortable, et la gêne dans les interactions sociales accentue encore la baisse de qualité de vie.
Jusqu’à 89 % des femmes opérées pour macromastie rapportaient des maux de tête avant l’intervention, et une proportion importante d’entre elles décrivaient une amélioration après une réduction mammaire.
Des options thérapeutiques
La réduction mammaire chirurgicale resterait l’intervention la plus efficace pour soulager durablement les douleurs et redonner de la mobilité, mais elle ne convient pas à toutes. Les patientes présentant une obésité ou certaines comorbidités doivent être accompagnées spécifiquement.
Un bon examen clinique demeure essentiel pour confirmer que les douleurs proviennent bien du volume des seins et non d’autres causes. Dans bien des cas, plusieurs facteurs se conjuguent : posture, raideurs articulaires, faiblesse musculaire, ergonomie au travail, fatigue, etc. Traiter ce qui peut l’être permet parfois de réduire suffisamment la douleur pour retrouver pleinement ses capacités fonctionnelles et une meilleure qualité de vie.
La physiothérapie garde ainsi une place importante : renforcement des muscles posturaux, travail de mobilité thoracique, optimisation de l’alignement postural. Même si elle ne modifie pas la cause (le volume mammaire), elle contribue à soulager les symptômes et à préparer, au besoin, une éventuelle chirurgie.
Ce qu’il faut retenir
Une poitrine volumineuse impose une force de bascule plus importante au thorax, même sans cyphose visible.
Elle est associée à des douleurs fréquentes, proportionnelles à la taille du bonnet.
Le poids corporel et la faiblesse musculaire amplifient encore ce risque.
De nouvelles données suggèrent des liens avec les fractures vertébrales et les céphalées chroniques.
La chirurgie de réduction mammaire offre un soulagement durable, mais la physiothérapie peut renforcer l’endurance posturale et améliorer la qualité de vie.
Pour aller plus loin, mes livres Lève-toi et marche et Plus jamais malade propose d'autres contenus complémentaires.
On peut aussi s’abonner gratuitement à mon infolettre et recevoir chaque semaine des conseils pratiques et du contenu exclusif.
Merci de prendre soin de vous – et à très bientôt.
Denis
Davantage de contenus
Vous trouverez d'autres contenus sur mes différentes plateformes:
Mon infolettre à laquelle vous pouvez vous abonner gratuitement
Mes livres
Ma page Facebook
Ma chaîne YouTube.
Références
Aref Y, Bono CM, Najafian A. Back pain in patients with macromastia: what a spine surgeon should know? Spine J. 2025 Mar;25(3):403-410. doi: 10.1016/j.spinee.2024.10.009. Epub 2024 Oct 21. PMID: 39424149.
Coltman CE, Steele JR, McGhee DE. Effect of Breast Size on Upper Torso Musculoskeletal Structure and Function: A Cross-Sectional Study. Plast Reconstr Surg. 2019 Mar;143(3):686-695. doi: 10.1097/PRS.0000000000005319. PMID: 30817639.
Fazelzadeh A, Mohammadi A, Tahayori B, Ebrahimi S, Khademi F. Evaluation of the Effect of Reduction Mammoplasty on Body Posture in Patients with Macromastia. J Biomed Phys Eng. 2023 Feb 1;13(1):99-104. doi: 10.31661/jbpe.v0i0.2109-1399. PMID: 36818008; PMCID: PMC9923239.
Lotan R, Marmor N, Weiss S, Sakhnini M, Hershkovich O. The Association Between Female Breast Size, Backache, and Quality of Life in Young Women: A Cross-Sectional Study. Medicina (Kaunas). 2025 Jul 26;61(8):1353. doi: 10.3390/medicina61081353. PMID: 40870399; PMCID: PMC12388340.
McCranie A, Lee AD, Cyrus C, Desjardins H, Winocour J, Mathes D, Kaoutzanis C. Evaluation of the Impact of Physical Therapy on Patients With Macromastia Seeking Breast Reduction Surgery. Aesthet Surg J. 2024 Nov 15;44(12):NP862-NP869. doi: 10.1093/asj/sjae163. PMID: 39041881.
Michalik R, Kühlmann B, Wild M, Siebers HL, Migliorini F, Eschweiler J, Betsch M. The Effect of Breast Size on Spinal Posture. Aesthetic Plast Surg. 2024 Apr;48(7):1331-1338. doi: 10.1007/s00266-022-03141-w. Epub 2022 Oct 24. PMID: 36280605; PMCID: PMC11035396.
Pocock KS, Laikhter E, Hardy BW, Holtzman-Hayes N, Strauss LD, Pavlovic JM, David LR, Katz AJ, Kumar S, Pestana I, Calder B, Nye BL, Duet M, Wells RE. Enlarged Breast Size (Macromastia) and Associated Neurologic Risks: A Scoping Review. Neurology. 2024 Aug 13;103(3):e209660. doi: 10.1212/WNL.0000000000209660. Epub 2024 Jul 16. Erratum in: Neurology. 2025 Jun 10;104(11):e213633. doi: 10.1212/WNL.0000000000213633. PMID: 39013127.
Spencer L, McKenna L, Fary R, Ho R, Briffa K. Is Breast Size Related to Prevalent Thoracic Vertebral Fracture? A Cross-Sectional Study. JBMR Plus. 2020 May 19;4(7):e10371. doi: 10.1002/jbm4.10371. PMID: 32666022; PMCID: PMC7340439.
