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Le gras corporel, un tissu qu’on redécouvre (enfin!) sous un nouveau jour

  • Photo du rédacteur: Denis Fortier
    Denis Fortier
  • 17 oct.
  • 7 min de lecture

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Le gras corporel est un sujet sensible. Il touche à l’image de soi, à nos repères de santé… et aux valeurs d’une société qui glorifie la minceur. Pourtant, derrière ce mot souvent perçu comme un simple excédent, se cache un véritable organe : le tissu adipeux. Loin d’être inerte, il participe à de nombreuses fonctions essentielles et dialogue en permanence avec les autres systèmes du corps — notamment les muscles.


Dans mon article d’aujourd’hui, je vous présente comment ce tissu qu’on croit passif contribue activement à l’équilibre du corps, comment il échange des signaux avec les muscles, et pourquoi cette interaction influence profondément la santé, pour le meilleur comme pour le pire — y compris celle des patients que j’accompagne au quotidien.


Bonne lecture… et bon visionnement, si vous me suivez aussi sur YouTube !


Un organe actif, pas un simple réservoir


Le gras corporel ne se limite pas à ce qu’on croit voir sur la balance. Il existe plusieurs formes de tissu adipeux, chacune ayant sa fonction : le sous-cutané, visible sous la peau ; le viscéral, plus profond, logé autour des organes ; et le brun, riche en mitochondries, capable de transformer l’énergie en chaleur et de contribuer à la régulation de la température du corps.


Lorsque la proportion de graisse viscérale devient trop importante — ce qui se produit surtout en situation d’obésité —, l’équilibre du corps s’en trouve perturbé : la régulation du sucre, de la tension artérielle et des graisses sanguines devient moins précise. Ce type de gras, plus « actif » sur le plan hormonal, joue un rôle central dans plusieurs troubles métaboliques associés à la résistance à l’insuline, comme le diabète de type 2, le syndrome métabolique, la dyslipidémie (taux de lipides anormaux dans le sang) ou encore l’hypertension artérielle.


Ce mécanisme n’est pas figé. Une activité physique régulière, même sans perte de poids majeure, aide à réduire progressivement la graisse abdominale. Cet effet est encore plus marqué lorsqu’elle s’accompagne d’un sommeil régulier et d’une alimentation équilibrée, qui soutiennent l’équilibre métabolique. D’après plusieurs synthèses d’essais cliniques, environ 150 minutes d’activité modérée par semaine — comme la marche rapide ou le vélo — suffisent à réduire la graisse viscérale de 5 à 10 %, et des durées plus longues amplifient encore cet effet. Ces durées d’exercice entraînent en moyenne une réduction de 5 à 10 % de la graisse abdominale, même sans changement de poids global.


Les adipokines : les messagères invisibles


Le tissu adipeux agit comme une glande, un peu comme la thyroïde ou les surrénales : il produit et libère dans le sang des substances appelées adipokines. Ces messagères chimiques influencent le fonctionnement du cœur, du foie, du cerveau et… des muscles.


Pourquoi en parle-t-on si peu ? Leur découverte n’est pourtant pas si récente : les premières adipokines ont été identifiées dans les années 1990, avec la mise en évidence de la leptine en 1994 — une découverte qui a profondément changé notre vision du « gras ».


On connaît aujourd’hui plus d’une centaine d’adipokines : certaines sont favorables, d’autres plus problématiques selon leur quantité et le contexte métabolique.


L’adiponectine, par exemple, soutient la sensibilité à l’insuline et exerce un effet anti-inflammatoire lorsqu’elle est présente à des niveaux normaux. Mais chez les personnes en situation d’obésité, son taux chute, ce qui contribue à la résistance à l’insuline et à un état inflammatoire persistant. À l’inverse, des molécules comme la leptine ou le TNF-alpha, lorsqu’elles sont produites en excès, entretiennent une inflammation chronique de bas niveau, souvent silencieuse.


Quand le corps accumule trop de graisse viscérale, reste inactif ou subit un stress chronique, l’équilibre entre ces adipokines se dérègle : les signaux favorables diminuent, tandis que les signaux pro-inflammatoires prennent le dessus. Ce déséquilibre altère la communication entre le tissu adipeux, les muscles et les autres organes métaboliques.


La bonne nouvelle, c’est que le mouvement agit comme un véritable régulateur hormonal. Les analyses comparatives récentes d’essais cliniques montrent qu’un programme d’exercice combinant des activités d’endurance et de renforcement musculaire, comme marcher à bonne allure, pédaler, nager ou réaliser quelques séances de musculation légère, peut réduire les concentrations de leptine et de TNF-alpha tout en augmenter celles d’adiponectine — un changement favorable au métabolisme et à l’inflammation.


Ces adaptations biologiques apparaissent après environ 8 à 12 semaines d’activité régulière, même sans perte de poids importante, ce que confirment aussi des synthèses réalisées chez les personnes atteintes de troubles métaboliques.


Le tissu adipeux agit comme une glande, un peu comme la thyroïde ou les surrénales : il produit et libère dans le sang des substances appelées adipokines. Ces messagères chimiques influencent le fonctionnement du cœur, du foie, du cerveau et… des muscles.

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Quand les muscles répondent au gras


Nos muscles ne se contentent pas de bouger : ils communiquent, eux aussi, notamment avec le tissu adipeux. Quand on les met en mouvement, ils libèrent des substances appelées myokines — découvertes au tournant des années 2000, soit environ une décennie après les adipokines. Ces messagers participent à une véritable conversation biochimique entre muscles et graisse, qui régule l’énergie, l’inflammation et la composition corporelle.


Chez les personnes actives, les myokines encouragent la transformation d’une partie de la graisse blanche en une forme plus “brune”, plus apte à brûler de l’énergie. Elles améliorent aussi la sensibilité à l’insuline, contribuant à stabiliser le taux de sucre dans le sang. Inversement, lorsqu’on bouge peu, les signaux positifs s’affaiblissent : la graisse devient plus inflammatoire et le muscle, moins efficace.


Des chercheurs ont observé qu’après douze semaines d’entraînement régulier, les adipokines pro-inflammatoires diminuent d’environ 15 %, tandis que les adipokines protectrices augmentent.


Ce n’est donc pas seulement une affaire de calories brûlées — une idée qui a longtemps occupé trop de place dans nos façons de penser le mouvement. C’est avant tout une question de dialogue retrouvé entre deux organes essentiels : le muscle et le gras, qui apprennent à se répondre à nouveau.



Une conversation à entretenir


L’idée est simple : plus les muscles sont actifs, mieux le tissu adipeux se comporte. Et plus ce dernier retrouve son équilibre, mieux les muscles fonctionnent. Cette alliance silencieuse explique pourquoi l’exercice agit sur tant d’aspects : l’énergie, l’humeur, la glycémie, la tension ou la récupération.


Pour nourrir cette communication, il n’est pas nécessaire de viser la performance. La régularité suffit : marcher chaque jour, faire quelques exercices de renforcement, jardiner ou danser, contribuent déjà à entretenir un tissu adipeux plus sain et plus “intelligent”. Les études montrent cependant que, pour en tirer un effet durable, il est utile d’atteindre à certains moments une intensité modérée à soutenue — celle qui fait respirer plus vite, sans aller jusqu’à l’essoufflement complet.


L’important n’est pas de “faire fondre” la graisse, mais de changer sa façon de travailler. Ce tissu n’est pas une réserve passive : c’est un organe vivant, influençable et essentiel, capable de retrouver son harmonie dès qu’on le remet en mouvement.


Nos muscles ne se contentent pas de bouger : ils communiquent, eux aussi, notamment avec le tissu adipeux. Quand on les met en mouvement, ils libèrent des substances appelées myokines — découvertes au tournant des années 2000.

À retenir


  • Le tissu adipeux agit comme une usine hormonale qui influence la glycémie, la tension et l’inflammation.

  • Sa répartition compte plus que sa quantité : le gras viscéral, logé dans l’abdomen, est le plus problématique.

  • Les muscles et la graisse dialoguent en permanence ; bouger régulièrement permet de rétablir une communication saine entre ces deux organes.

  • 150 à 200 minutes d’activité modérée par semaine suffisent pour améliorer le profil métabolique et la composition corporelle — à condition de choisir une activité qui vous plaît, qui s’intègre à votre quotidien et qui reflète vos valeurs. C’est souvent la clé pour que le mouvement devienne durable.


Pour aller plus loin, mes livres Lève-toi et marche et Plus jamais malade proposent d'autres contenus complémentaires.


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Denis



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Références

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