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Tendinite de la coiffe : pourquoi l’excentrique change tout

  • Photo du rédacteur: Denis Fortier
    Denis Fortier
  • 20 oct.
  • 5 min de lecture

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Certains exercices paraissent presque trop simples pour produire de réels effets. Ils exigent peu d’équipement, peu de temps, mais offrent des effets mesurables et durables. Parmi eux, l’entraînement excentrique occupe une place particulière.


D’abord popularisé dans la prise en charge des tendinopathies d’Achille, il est aujourd’hui utilisé dans plusieurs contextes : coiffe des rotateurs, coude, genou ou hanche. Ce n’est ni une technique marginale ni une tendance éphémère, mais un principe biomécanique solide : faire travailler un muscle pendant qu’il s’allonge, autrement dit, freiner le mouvement plutôt que le produire.


Dans mon article d’aujourd’hui, je reviens sur ce que la science nous apprend du rôle de ces exercices dans la tendinopathie de la coiffe des rotateurs. Comment agissent-ils ? Pourquoi donnent-ils souvent de bons résultats ? Et comment les intégrer à une rééducation sans risquer de raviver la douleur ?


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Les informations présentées dans cet article sont de nature générale et ne remplacent pas l’évaluation ni les recommandations personnalisées d’un professionnel de la santé.


Qu’est-ce qu’un exercice excentrique ?


Un muscle peut se contracter de trois façons :


  • Concentrique : lorsqu’il se raccourcit, comme quand on soulève un objet.

  • Isométrique : lorsqu’il se contracte sans bouger, comme lorsqu’on maintient une position.

  • Excentrique : lorsqu’il résiste tout en s’allongeant — par exemple lorsqu’on freine la descente d’un bras, ralentit une marche en pente ou absorbe un saut.


Ce dernier mode de contraction nous intéresse particulièrement, les physiothérapeutes : il stimule les fibres tendineuses sans les agresser, en développant une force contrôlée, souvent supérieure à celle obtenue lors d’un travail concentrique.


5 exemples du quotidien :


  1. Descendre lentement un escalier.

  2. Freiner la chute d’un objet tenu à bout de bras.

  3. Ralentir la descente d’un squat.

  4. Contrôler le retour du bras après un lancer.

  5. Amortir l’impact au moment de poser le pied au sol pendant la course.


Ce que montre la recherche


Une étude récente a comparé trois groupes : un travaillant en excentrique, un autre en concentrique et un groupe témoin. Après douze semaines, le renforcement excentrique a permis un gain plus marqué en force d’abduction et en proprioception (perception de la position du bras dans l’espace), sans toutefois entraîner d’amélioration cliniquement significative par rapport aux autres groupes. Ces résultats suggèrent que l’excentrique offre un avantage modeste, mais réel sur la force et le contrôle moteur de l’épaule, sans effet notable sur la douleur ou la mobilité globale.


Dans la même lignée, une autre recherche a montré que l’ajout d’exercices excentriques à un programme de base incluant chaleur et étirements entraînait une amélioration significative de l’amplitude d’adduction horizontale et de l’endurance de l’épaule, comparativement au groupe témoin. En revanche, la rotation interne, la douleur et la fonction globale se sont améliorées dans les deux groupes, sans différence significative entre eux. L’excentrique semble donc réduire la raideur postérieure et améliorer le contrôle musculaire, sans effet supplémentaire sur la douleur à court terme.


Sur un plan plus fondamental, une étude menée sur modèle animal a montré que la stimulation mécanique excentrique favorise la guérison du tendon en modulant la réponse immunitaire locale. Les chercheurs ont observé une augmentation des macrophages réparateurs (M2) et une diminution des macrophages pro-inflammatoires (M1), accompagnées d’une meilleure organisation fibrocartilagineuse et d’une résistance accrue à la jonction tendon-os. Ces effets disparaissaient toutefois lorsque les macrophages étaient supprimés, suggérant que les bénéfices de l’excentrique reposent en partie sur la régulation de la réponse cellulaire et la qualité de la réparation tissulaire.


Ces résultats, issus de niveaux de preuve complémentaires, convergent vers une même idée : le travail excentrique ne renforce pas seulement le muscle ; il agit aussi sur la biologie du tendon et sur sa capacité d’adaptation.


La contraction excentrique se produit lorsque le muscle résiste tout en s’allongeant — par exemple lorsqu’on freine la descente d’un bras, ralentit une marche en pente ou absorbe un saut.

Pourquoi ce type d’exercice fonctionne si bien


Les contractions excentriques exposent le tendon à une tension lente et contrôlée, proche des contraintes réelles du quotidien. Elles améliorent la vascularisation locale, stimulent la régénération cellulaire et optimisent la coordination neuromusculaire. Le système nerveux apprend à ajuster l’effort, à stabiliser l’épaule et à prévenir les mouvements brusques. Dans la coiffe des rotateurs, ce type de travail aide les muscles stabilisateurs à mieux répartir les forces autour de l’articulation, réduisant ainsi la surcharge sur les tendons douloureux.


Contrairement aux exercices purement concentriques, l’excentrique développe la force dans toute l’amplitude, y compris dans les zones vulnérables où la douleur apparaît souvent. Le tendon devient non seulement plus solide, mais aussi plus tolérant à la charge.


Les contractions excentriques exposent le tendon à une tension lente et contrôlée, proche des contraintes réelles du quotidien.

Comment les intégrer à une rééducation


L’erreur la plus fréquente consiste à introduire les excentriques trop tôt et trop vite, quand la douleur est encore vive. Ils doivent être intégrés progressivement, une fois la mobilité de base retrouvée et le contrôle moteur suffisant — dit simplement, lorsque le bras bouge sans douleur marquée et que la stabilité de l’omoplate est bien contrôlée.


Quelques repères simples :


  • Commencer avec un mouvement lent, sans charge ou avec un élastique léger.

  • Freiner la descente du bras pendant quatre à cinq secondes, puis remonter avec l’aide de l’autre main.

  • Répéter dix à quinze fois, une à deux fois par jour, trois à cinq jours par semaine.

  • Éviter toute douleur vive pendant et après : une légère gêne temporaire est acceptable.


Deux exemples :


  1. Rotation excentrique : tenir un élastique, amener lentement la main vers le ventre en freinant la rotation.

  2. Abduction contrôlée : lever le bras latéralement, puis redescendre lentement, sans hausser l’épaule.


Ces gestes simples, répétés avec constance, entraînent des adaptations profondes, sans rien de magique : seulement une dose bien calibrée de mouvement et de patience.



Retrouver le contrôle du mouvement


L’entraînement excentrique ne vise pas à « réparer » le tendon, mais à restaurer sa tolérance et sa coordination. Chaque répétition renforce la capacité du système neuromusculaire à gérer la charge et à rétablir la fluidité du geste.


C’est ce qui explique pourquoi, même sans charge lourde ni équipement sophistiqué, ces exercices transforment souvent la trajectoire de la rééducation. Ils redonnent à nos patients la capacité de reprendre le contrôle de leur épaule — et donc de leur guérison.


À retenir


  • Les exercices excentriques favorisent la réparation du tendon tout en développant la force.

  • Ils améliorent la mobilité, l’endurance et la proprioception.

  • Leur efficacité repose sur la lenteur, la constance et la progressivité.

  • Bien intégrés, ils deviennent un outil clé pour traiter les tendinopathies de la coiffe des rotateurs.


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Denis



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Références


Huang SY, Lin YL, Tsai YS, Huang TS. The Effects of Eccentric-focused Exercises on Posterior Shoulder Tightness in Amateur Baseball Players with Subacromial Pain Syndrome: A Randomized Controlled Trial. J Shoulder Elbow Surg. 2025 Sep 18:S1058-2746(25)00652-4. doi: 10.1016/j.jse.2025.08.004. Epub ahead of print. PMID: 40975207.


Karabay D, Yeşilyaprak SS, Erduran M, Ozcan C. Effects of Eccentric Versus Concentric Strengthening in Patients With Subacromial Pain Syndrome: A Randomized Controlled Trial. Sports Health. 2025 Mar;17(2):322-331. doi: 10.1177/19417381241236817. Epub 2024 Mar 26. PMID: 38532530; PMCID: PMC11569646.


Peng Y, Diao L, Li F, Wang J, Yu Y, Jia S, Zheng C. Eccentric mechanical stimulation promotes rotator cuff healing by regulating macrophage polarization in a murine model. J Shoulder Elbow Surg. 2025 Aug 22:S1058-2746(25)00607-X. doi: 10.1016/j.jse.2025.07.008. Epub ahead of print. PMID: 40850392.

 
 
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