Quand les muscles rapetissent : comprendre et prévenir l’atrophie
- Denis Fortier

- 25 sept.
- 6 min de lecture
Dernière mise à jour : 15 oct.

L’atrophie musculaire désigne l’amincissement et l’affaiblissement d’un muscle. Elle peut survenir avec l’avancée en âge, certaines maladies, l’inactivité ou une immobilisation prolongée. Il ne s’agit pas d’un simple épuisement musculaire : c’est un phénomène biologique profond où les fibres s’amincissent et, le plus souvent, la force comme l’endurance reculent.
Dans cet article, je vous propose d’élargir la perspective : comprendre ce qui se passe dans un muscle qui s’atrophie, pourquoi le phénomène s’accentue avec l’âge, et surtout comment le freiner.
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Ce qui se passe dans un muscle qui s’atrophie
Le muscle est un tissu vivant, pas comme les autres, doté d’une capacité d’adaptation exceptionnelle. J’en parle souvent sur mes différentes plateformes, et la science ne cesse de confirmer à quel point cette propriété est unique. Sollicité par le mouvement, l’effort ou l’entraînement, il se renforce et devient plus efficace. À l’inverse, lorsqu’il est peu utilisé, il perd du volume, de la force et, pourrait-on dire, de son agilité.
Tout repose sur un équilibre : la construction et la dégradation des protéines qui composent ses fibres. Dès que la balance penche du côté de la perte, le muscle rapetisse.
Plusieurs facteurs contribuent à ce déséquilibre :
Moins de sollicitations mécaniques : l’immobilisation ou le manque d’activité réduisent la fabrication de protéines musculaires et accélèrent leur dégradation.
Moins d’énergie produite : les mitochondries — véritables “centrales énergétiques” des cellules — deviennent moins efficaces, produisent plus de déchets oxydants et perturbent l’équilibre du muscle.
Une inflammation persistante : avec l’âge ou certaines maladies, l’organisme libère davantage de “messagers inflammatoires” qui favorisent la dégradation des fibres et freinent leur régénération.
Un soutien hormonal réduit : la diminution de certaines hormones (testostérone, œstrogènes, IGF-1) affaiblit la capacité des cellules satellites — ces cellules de réserve qui réparent les fibres — à jouer pleinement leur rôle.
Inflammation et autophagie : deux mécanismes clés
Deux processus internes accentuent l’atrophie avec l’âge :
L’inflammation chronique de bas grade : l’organisme produit davantage de molécules inflammatoires qui perturbent la régulation des protéines musculaires et favorisent leur perte.
L’autophagie compromise : ce système de “nettoyage” cellulaire élimine normalement les mitochondries défectueuses et les déchets. Avec l’avancée en âge ou certains problèmes de santé, il devient moins efficace, ce qui accélère l’affaiblissement musculaire.
La bonne nouvelle : certains types d’exercices peuvent à la fois réduire l’inflammation et stimuler une autophagie plus efficace.
L’immobilisation ou le manque d’activité réduisent la fabrication de protéines musculaires et accélèrent leur dégradation.
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L’inactivité : un accélérateur d’atrophie
Parmi tous les facteurs, l’inactivité physique et l’immobilité prolongée sont de véritables accélérateurs de l’atrophie. Quelques jours d’alitement suffisent à réduire la masse et la force musculaire. Et ce n’est pas seulement le muscle : les tendons aussi perdent de leur qualité lorsqu’ils ne sont plus sollicités.
Les études menées en conditions de microgravité, notamment chez les astronautes, montrent bien que l’absence de contraintes mécaniques entraîne une baisse de la fabrication des protéines musculaires et une hausse de leur dégradation.
Chez les adultes vieillissants, cette fragilité est encore plus prononcée. Une hospitalisation, même courte, peut avoir des conséquences durables sur l’autonomie. La récupération est souvent plus lente : les cellules satellites, chargées de régénérer les fibres, fonctionnent moins efficacement, et l’inflammation a tendance à s’amplifier.
La bonne nouvelle : certains types d’exercices peuvent à la fois réduire l’inflammation et stimuler une autophagie plus efficace.
Sarcopénie : une forme particulière d’atrophie
J’ai souvent parlé de sarcopénie sur mes différentes plateformes, à la radio et dans mes livres. Ce terme désigne une condition médicale particulière : la perte progressive de masse, de force et de performance musculaires liée au vieillissement. Mais elle ne se limite pas aux muscles eux-mêmes : elle s’accompagne aussi de changements métaboliques plus larges, liés à l’âge, mais également à l’obésité ou à certaines maladies chroniques.
En clair, la sarcopénie inclut presque toujours une forme d’atrophie, mais l’inverse n’est pas systématique : un muscle peut s’atrophier en dehors d’un contexte de sarcopénie, par exemple après une immobilisation.
La sarcopénie touche environ 5 à 10 % des adultes de plus de 60 ans et devient progressivement plus fréquente à partir de la soixantaine. Cette diminution des capacités peut cependant commencer bien plus tôt. Chez beaucoup, la performance maximale est atteinte entre 25 et 35 ans. Toutefois, certaines personnes actives et les athlètes parviennent à maintenir des performances élevées plus longtemps. Et avec un entraînement bien conçu, il n’est pas rare d’être plus fort à 60 ans qu’à 40.
La vitesse de cette perte dépend de nombreux facteurs : activité, alimentation, génétique, maladies chroniques. Et au niveau biologique, la sarcopénie s’accompagne de :
la perte de fibres musculaires dites « rapides », celles qui produisent la puissance explosive ;
l’accumulation de cellules sénescentes, des cellules vieillissantes qui n’assurent plus leurs fonctions ;
l’affaiblissement des jonctions neuromusculaires, ces points de contact entre les nerfs et les fibres.
Tous ces changements diminuent la précision avec laquelle les muscles sont recrutés, ce qui fragilise l’équilibre et la mobilité.
Les effets bénéfiques de l’exercice
À ce jour, aucun médicament ne stoppe l’atrophie liée à l’âge. Mais une stratégie a fait ses preuves : l’activité physique régulière. Voici quatre façons dont l’exercice contribue à préserver la masse et la fonction musculaires :
L’entraînement en résistance — musculation avec charges, élastiques ou poids du corps — stimule la fabrication de protéines, limite leur dégradation et améliore la santé énergétique du muscle. Il aide aussi à réduire l’inflammation.
Les exercices d’endurance, comme la marche rapide, le vélo, la course, la danse et la natation, améliorent la circulation et la capacité des muscles à utiliser l’oxygène, ce qui les rend plus résistants.
Le préconditionnement par l’exercice. Pratiquer régulièrement avant une période à risque (immobilisation, traitement, chirurgie) agit comme une assurance. Les muscles « préparés » sont plus résistants et récupèrent mieux.
L’entraînement de haute intensité adaptée: même à un âge avancé, s’entraîner avec des charges lourdes — soit environ 80 à 85 % du poids maximal qu’on peut soulever une fois — s’avère particulièrement efficace pour maintenir la puissance et la vitesse. Ce n’est pas parce qu’on vieillit qu’on ne peut pas progresser : au contraire, les gains peuvent être impressionnants.
La sarcopénie inclut presque toujours une forme d’atrophie, mais l’inverse n’est pas systématique : un muscle peut s’atrophier en dehors d’un contexte de sarcopénie, par exemple après une immobilisation.
Varier pour protéger tous les muscles
Tous les muscles ne réagissent pas de la même manière. Les quadriceps, à l’avant de la cuisse, sont particulièrement sensibles à l’inactivité et au vieillissement. D’autres muscles, comme les biceps ou les muscles du dos, résistent davantage ou répondent différemment aux mêmes exercices.
Autrement dit, tous les muscles n’ont pas la même vulnérabilité ni la même capacité d’adaptation. Cela signifie qu’il faut varier les exercices et solliciter l’ensemble du corps — jambes, tronc, bras et dos — pour maintenir la mobilité, l’équilibre et l’autonomie.
Prévenir l’atrophie : un enjeu collectif
L’atrophie musculaire n’est pas une fatalité. Elle résulte d’une combinaison de mécanismes : manque de mouvement, inflammation accrue, modifications hormonales et accumulation de déchets cellulaires.
La sarcopénie en est la forme la plus connue, mais elle n’est pas la seule. Une immobilisation, certaines maladies chroniques, ou même la vie en apesanteur chez les astronautes peuvent déclencher les mêmes processus.
La prévention repose avant tout sur le mouvement : musculation, endurance, ou un mélange des deux. L’alimentation joue aussi un rôle essentiel (apports suffisants en protéines, vitamine D, etc.), même si cet article se concentre sur les effets de l’activité physique.
Bouger régulièrement, solliciter ses muscles, c’est non seulement préserver leur volume, mais aussi protéger sa mobilité, son équilibre et, en fin de compte, sa qualité de vie.
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Denis
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Références
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