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Quand le genou se dérègle : comprendre (et prévenir) l’arthrose fémoro-patellaire

  • Photo du rédacteur: Denis Fortier
    Denis Fortier
  • 15 oct.
  • 6 min de lecture

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La douleur à l’avant du genou ne touche pas seulement les jeunes sportifs. Elle peut aussi s’installer plus tard, de manière plus insidieuse, sous forme d’arthrose fémoro-patellaire — cette usure du cartilage entre la rotule et le fémur, souvent méconnue et parfois confondue avec d’autres problèmes du genou. Ce type d’arthrose se distingue par ses symptômes, son évolution et sa logique biomécanique propres.


Dans mon article d’aujourd’hui, je vous propose de comprendre comment la forme du genou, la force musculaire et l’équilibre du mouvement peuvent influencer le vieillissement du cartilage… et pourquoi le corps tente parfois de compenser du mieux qu’il peut, jusqu’à se dérégler.


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Une articulation fragile par nature


La rotule coulisse dans une gorge du fémur appelée trochlée — un duo mécanique aussi précis qu’un pas de tango… quand tout va bien. Ce glissement se fait sur un coussin de cartilage censé répartir les pressions et amortir les chocs. Mais cette mécanique, en apparence parfaite, est aussi délicate : la rotule est soumise à des forces pouvant atteindre jusqu’à six fois le poids du corps lors d’un saut ou d’une descente d’escaliers, et huit fois, par exemple, lors d’un squat décliné.


Avec le temps, des microtraumatismes répétés, une faiblesse musculaire ou une mauvaise répartition des charges peuvent entraîner une usure progressive du cartilage fémoro-patellaire.


Cette usure se manifeste souvent par :


  • une douleur à l’avant du genou, notamment en montant ou descendant les escaliers ;

  • une raideur matinale ;

  • et parfois une sensation de craquement ou de frottement.


Selon une méta-analyse publiée dans la revue Osteoarthritis and Cartilage, environ 25 % des adultes de plus de 20 ans présentent une arthrose fémoro-patellaire à l’imagerie, et cette proportion grimpe à près de 40 % chez les personnes souffrant déjà de douleurs au genou. Ces chiffres rappellent combien cette forme d’arthrose est fréquente, mais souvent sous-reconnue, notamment parce qu’elle se confond facilement avec d’autres atteintes du genou.


Précision : la présence d’arthrose fémoro-patellaire à l’imagerie n’est pas nécessairement corrélée à la douleur ni à une perte de fonction, aussi surprenant que cela puisse paraître. Autrement dit, certaines personnes présentent des signes radiographiques marqués sans ressentir de gêne, tandis que d’autres, peu atteintes à l’imagerie, éprouvent des douleurs importantes, dont la source n’est pas toujours liée à l’arthrose elle-même.



Quand la forme du genou influence la mécanique


Toutes les rotules ne se ressemblent pas. Certaines sont plus hautes, plus inclinées ou glissent moins bien dans leur gouttière. Selon une revue de la littérature récente, les variations de forme ou d’alignement de la rotule — par exemple, une rotule haute ou une trochlée trop plate — augmentent le risque de développer une arthrose localisée à ce compartiment.


Ces particularités peuvent accentuer les pressions sur certaines zones du cartilage.

Imaginez une roue légèrement désaxée : à force de tourner, un seul côté s’use prématurément. C’est exactement ce qui se passe dans le genou : la contrainte devient asymétrique, et les tissus environnants — os, synoviale, ménisques — finissent par réagir. Et malheureusement, le genou n’a pas droit au changement de pneus après quelques milliers de kilomètres.


Les chercheurs insistent sur la relation entre la forme de la rotule et celle de la trochlée — parfois appelée morpho-alignement patellaire. Quand cet ajustement est perturbé, le couple mécanique perd son harmonie, ce qui favorise une usure sélective, parfois précoce, du cartilage.


Environ 25 % des adultes de plus de 20 ans présentent une arthrose fémoro-patellaire à l’imagerie, et cette proportion grimpe à près de 40 % chez les personnes souffrant déjà de douleurs au genou.

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Le rôle clé des muscles et du mouvement


Au-delà de la morphologie, la qualité du contrôle musculaire joue un rôle déterminant dans l’équilibre du genou.


Une méta-analyse montre que les personnes atteintes d’arthrose fémoro-patellaire présentent souvent une activation musculaire altérée :


  • le quadriceps est fréquemment affaibli ou mal synchronisé ;

  • les muscles de la hanche, notamment les abducteurs et les rotateurs externes, manquent parfois de force ;

  • le contrôle du tronc est souvent insuffisant pour maintenir le genou dans l’axe.


Ces déficits se traduisent par une augmentation des forces de cisaillement sur la rotule et favorisent une irritation chronique. C’est un peu comme si le moteur d’une voiture tirait d’un côté : le genou fait ce qu’il peut, mais il n’a pas de volant pour corriger la trajectoire.


Les chercheurs rappellent que l’arthrose ne dépend pas seulement de la quantité de force, mais aussi de sa répartition dans le temps et dans l’espace : la manière dont le genou gère la charge à chaque pas, à chaque montée, à chaque mouvement. C’est là que se joue une grande partie de la prévention — non pas dans l’immobilité, mais dans la précision du mouvement, où la réadaptation occupe un rôle déterminant.


La présence d’arthrose fémoro-patellaire à l’imagerie n’est pas nécessairement corrélée à la douleur ni à une perte de fonction, aussi surprenant que cela puisse paraître.

Quand tout part… du ménisque ou de la marche


Certaines atteintes du genou, comme une déchirure méniscale, peuvent aussi modifier la façon dont le genou bouge et répartit les pressions. Une étude expérimentale a montré qu’une lésion du ménisque perturbe non seulement la répartition des charges, mais aussi la démarche et la coordination articulaire. Ces changements entraînent une inflammation de la membrane synoviale (synovite) et une dégénérescence accélérée du compartiment fémoro-patellaire.


Autrement dit, une douleur ou une atteinte initiale à un endroit du genou peut, à moyen terme, dérégler l’ensemble du système. Le corps compense, dévie, puis finit par créer un nouveau problème ailleurs. C’est ce que j’observe souvent en clinique : le genou s’adapte… jusqu’à un certain point.



L’arthrose fémoro-patellaire : une affaire d’équilibre


Loin d’être une fatalité, l’arthrose fémoro-patellaire reflète un déséquilibre progressif entre les charges subies et la capacité du cartilage à les absorber. Les recherches récentes convergent vers une approche plus fonctionnelle et dynamique : il ne s’agit pas seulement d’un problème d’usure, mais d’un désajustement du mouvement.


Ainsi, deux personnes présentant des images radiologiques similaires peuvent avoir des expériences très différentes : l’une douloureuse et limitée, l’autre parfaitement active. Ce n’est donc pas la quantité d’usure qui compte, mais la qualité du mouvement, la force musculaire et la capacité d’adaptation de l’articulation.


Une étude qualitative illustre bien cette diversité d’expériences : les premiers signes de l’arthrose fémoro-patellaire varient considérablement d’une personne à l’autre, selon leur posture, leur activité et leur rapport au mouvement.


L’arthrose ne dépend pas seulement de la quantité de force, mais aussi de sa répartition dans le temps et dans l’espace : la manière dont le genou gère la charge à chaque pas, à chaque montée, à chaque mouvement.

Retrouver l’harmonie… du mouvement


L’arthrose fémoro-patellaire résulte d’un dialogue interrompu entre la forme, la force et la fonction. La bonne nouvelle : comprendre ce déséquilibre permet d’agir plus tôt. Renforcer, rééduquer et rétablir la coordination du mouvement sont les premières étapes vers un genou plus stable — ou du moins un genou qui ne fait plus la tête dans les escaliers.


Une consultation en physiothérapie (au Québec) ou en kinésithérapie (en France) permet souvent d’y voir plus clair, d’évaluer les causes précises du déséquilibre et de choisir un plan de traitement adapté à chaque personne.


Pour aller plus loin, mes livres Lève-toi et marche et Plus jamais malade proposent d'autres contenus complémentaires.


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Merci de prendre soin de vous... et à très bientôt.


Denis


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Références


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